25/10/2012

STILL LIfE


Ce travail a été réalisé entre 2000 et 2005 dans le sud Californie, le Western Australia et le nord du Queensland en Australie.

VIDEO



 images et textes Christine Wilmes - agencement textes Patrick Mascaux


LOGBOOK

Un camion passe
deux mouches volent
un train déroule en silence ses deux kilomètres 
de wagons de minerai de fer.

A la bifurcation un homme est assis sur son sac de toile.
A droite la route va vers l’orage et l’océan.
Tout droit elle se perd pendant des jours entre 
les plaques de sable rouge.

50° à l’ombre, une voiture noire stationne devant 
la caravane argentée qui brille au soleil . 
Pas une route n’arrive jusque là.

Dunmara Road House la gas station cernée de désert rouge
cherche une coiffeuse expérimentée et un chef coq.

Quatre lévriers en pullover
dans les soutes d'une Landmate-X
                                                       

5heures du mat.
La voiture éclatée les vitres explosées
Deux aborigènes bourrés hurlent sous la pluie.

Trois gamins se cachent sous le pont dans les hautes herbes. 
Snifent de la colle.

Un fin filet de fumée monte d’une cheminée posée sur l’horizon.
La route court à travers le désert vallonné.
D’une crête à l’autre l’usine et sa ville sortent 
de la terre rouge 
grandissent du milieu de nulle part.

En équilibre sur le mur de sa propriété 
un caniche aboie et surveille.
Une voisine hurle. 
Le chien se tait.
                                                       

Une Holden Commodore patine et s’enlise sur la plage.
Les pêcheurs posent leurs Foster sur le sable 
et poussent la voiture.
Elle racle crache perd des morceaux.

Au milieu de rien à un des bouts du monde 
le long de l’Océan Indien 
vibre une assemblée des termitières.
Un Ancêtre Kangourou passe s’arrête observe.

Le bus de la mine promène les touristes.
Ils sont tous équipés de lunettes en plastique transparent 
de casques bleus aux couleurs de la compagnie.

Un vent de tempête arrache tout et disperse la poussière. 
Le sable vole brûle les yeux cache le soleil.
Les buissons secs roulent s’accrochent aux barbelés 
des clôtures.

De cinq à six 
Simply Vicky chante du country 
au camping municipal.
                                                       

Un minuscule carré de lumière flotte sur l’horizon 
dans le silence de la nuit.
Un road train illuminé comme un sapin de Noël décélère 
et fait le plein à la BP.

Les longs cous veloutés et les figures sérieuses 
d’une trentaine de chameaux au regard distant 
s’échappent des trois remorques jaunes.

Le pêcheur debout sur sa barque au milieu de la 
rivière opaque ramène un gros baramundi.
Une dizaine de crocodiles salties vautrés sur 
les berges le guettent 
la gueule grande ouverte.
                                                       

C’est bourré de crottes . 
A croire que le chien se venge de tous 
les crocodiles vivants 
en chiant sur leur réplique en béton.

Un jabiru à tête bleue s’est posé entre 
les camions devant le baobab creux.

Les gérants de la banque et de l’épicerie sont blancs.
Les vendeuses aussi.
Quelques abos couverts de bandages 
et les yeux gonflés attendent 
l’ouverture de l’épicerie 
assis sur le trottoir.

Le vieux mineur silicosé et barbu assis 
sur une chaise devant le Sears
actionne la pompe du respirateur portable 
posé à côté de lui sur un bras métallique à roulettes.

Une longue cosse en losange 
recouverte d’une fine peau 
douce comme la soie des cercueils de luxe 
pend au dessus d’une tombe du cimetière des pionniers.
                                                       

Dimanche.
Son casque de motard vissé sur la tête
assis sur un banc devant l’église
le pasteur évangéliste attend les fidèles.
Le vent souffle dans les pins. 
Le sol sablonneux se dérobe sous les pas dans 
un paysage de fagnes.
Un dingo un sanglier pendus par les pattes arrières. 
                                                       

Les cheveux roux en pétard
des taches claires sur la peau noire
le jeune abo
hilare en t-shirt et pieds nus
danse pour la pluie glacée à 4°


Un filet d’eau émeraude coule au fond du canyon.
Les tortues aux longs cous nagent dans les trous d’eau.
Les grands oiseaux fins en équilibre sur les rochers 
attendent la fraîcheur du soir pour pêcher.